Champagne-Céréales actionnaire d'Agrogénération / La réalité ukrainienne
La grande « secousse économique » n'a pas favorisé l'installation d'agriculteurs français en Ukraine
L'Ukraine (40 millions d'hectare de terres cultivées) est-elle le paradis des
grands groupes de l'agroalimentaire ? Depuis 2002, Champagne Céréales
s'intéresse aux vastes plaines de ce pays de l'Est. « Nous avons débuté sur un
accord avec Inbev* avec la reprise de deux malteries. À l'époque, la bière était
en plein boum », raconte Laurent Jubert, directeur général de Champagne
Céréales. Cette première initiative a été suivie par une seconde concernant la
collecte de céréales, celle de distribution de produits phytosanitaires et de
semences, pour la plus grande partie liée à l'activité de Malteurop, filière de
Champagne Céréales.
« En 2007, nous avons repris une ferme pour servir de
ferme expérimentale pour nos adhérents agriculteurs qui souhaitaient s'installer
en Ukraine. » Le projet est intéressant mais vite compromis par la flambée des
prix des céréales, puis la chute des cours. « La crise économique a secoué
l'Ukraine. Les banques ont supprimé les crédits locaux, le chômage a vu ses
chiffres grimper, la consommation a diminué, sans oublier le contexte politique
qui était particulièrement instable. » Face à cette « grande secousse », les
attraits du grenier à blé ukrainien sont devenus moins séduisants.
« Même si
on peut considérer qu'en 2010 la situation se normalise, la bière est en chute
et l'agriculture y est difficile ».
Le constat est évident : « Très peu
d'agriculteurs français ont souhaité entreprendre des projets sur ces terres ».
Le mirage ukrainien se désagrège. Soucieux d'une bonne gestion, Champagne
Céréales décide de se retirer.
« Nous avons décidé de devenir actionnaire
minoritaire (entre 5 et 10 %) d'AgroGénération. Ce sont des spécialistes. »
Dirigé par Charles Beigbeder, AgroGeneration est un producteur de matières
premières agricoles qui a pour objectif de cultiver 100 000 hectares en Ukraine
d'ici 2012.
Sa stratégie est de remettre en culture les terres en friches et
de restructurer les anciennes installations des kolkhozes qui ont souffert de
sous-investissement. En revanche, Champagne Céréales garde la main sur la
collecte. « Nous avons d'ailleurs étendu nos surfaces avec le blé, le colza et
le maïs. Cela marche bien, d'ailleurs nous pensons encore et toujours que
l'Ukraine possède un grand potentiel pour l'agriculture. »
À ce propos, une
réflexion est menée sur une alliance avec les groupes français présents dans le
pays, à l'instar de Soufflet ou Euralis, « car pour réussir là-bas il faut des
financements et des entrepreneurs ».
*Inbev est une filiale du groupe
brassicole Anheuser-Busch InBev, le plus grand brasseur au monde de par le
volume de bière brassée.
Sophie Claeys-Pergament
http://www.lunion.presse.fr/article/economie-region/champagne-cereales-actionnaire-dagrogeneration-la-realite-ukrainienne